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 ça ne concerne pa directement la BULGARIE mais tellement vra

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KRISKA

KRISKA


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ça ne concerne pa directement la BULGARIE mais tellement vra Empty
MessageSujet: ça ne concerne pa directement la BULGARIE mais tellement vra   ça ne concerne pa directement la BULGARIE mais tellement vra EmptySam 3 Fév - 17:07

Cet article ne concerne pas directement la BG mais il est tellment vrai et explicite, il m'a bcp plu et j'avais envie de vous le faire partager car il donne à réfléchir.
Qu'en pensez-vous ???

Shekulli
Balkans, mon amour !


Traduit par Mandi Gueguen
Publié dans la presse : 28 janvier 2007
Mise en ligne : samedi 3 février 2007


Peut-on être Albanais et quelqu’un d’autre à la fois ? Peut-on aimer son pays tout en en ayant adopté un autre ? Peut-on vivre dans deux cultures dont certains veulent faire de la différence un fossé infranchissable ? A l’heure de la mondialisation, où les cultures se mêlent et s’entremêlent, où les frontières deviennent des fantômes du passé, dans les Balkans, ces dernières sont ailleurs que sur terre, ancrées au plus profond des mentalités des uns et des autres... Et il est parfois bien ardu de passer outre.

Par Gazmend Kapllani

On ne s’ennuie pas dans les Balkans. Il y a quelques jours, je reçois un coup de téléphone d’une association grecque de traducteurs littéraires, qui m’annoncent que le premier prix m’a été accordé. Je demande à la très aimable et généreuse interlocutrice la raison de ce prix. Mais pour la traduction en grec de votre livre Petit journal de frontières, me répond-elle. Il se trouve seulement que ce livre-là, je l’ai écrit en grec directement. À cette dame, on avait dit qu’il s’agissait d’une traduction. Évidemment, à qui viendrait-il à l’esprit qu’un émigrant albanais puisse écrire un livre en grec, qui, et heureusement pour moi, est devenu un grand succès en librairie ?

Mais ce n’est pas tout. Un ami qui avait voulu acheter mon livre l’avait trouvé en librairie dans le rayon littérature étrangère, à côté de Joyce. A la question pourquoi l’avoir rangé là, le libraire avait répondu que même si le livre était écrit en grec, pour eux c’était le nom qui comptait, et Gazmend n’est forcément pas un prénom grec. N’est-ce pas extra ?

Les Balkans changent, nous dit-on. Les Balkans qui sont en Europe, et qui veulent y entrer. Dans des rencontres de promotion de mon livre, partout où je vais, la question principale est : « D’où viens-tu ? ». Car, et on le sait bien, dans les Balkans, il faut être de quelque part. Je réponds que je suis un être culturellement hybride, Albanais et Grec, Grec et Albanais. Que puis-je être d’autre ? J’ai passé la moitié de ma vie en Albanie et l’autre moitié en Grèce. Je parle les deux langues, j’écris dans les deux langues. Je rêve dans les deux langues. Mais on n’est pas habitué à cela dans les Balkans. Nous avons appris que la double identité est quelque chose de dangereux, dont il faut souvent se méfier. Les Balkans nous ont habitués à l’idée que l’identité n’est pas dans notre esprit, que ce n’est pas une question de valeurs auxquelles on croit mais une question de sang. Car nous sommes rompus aux identités meurtrières. À la limite, si tu es Albanais et Grec, ce n’est pas si grave que cela. Mais imagine, mon cher journal, ce que vit celui qui se déclare Serbe et Albanais, Turc et Grec ?

Nombreux sont ces « patriotes » albanais qui directement ou indirectement me « reprochent » de dévoiler sans gêne ma double identité, albanaise et grecque. Dans les Balkans ces choses-là sont mal vues. Les Balkans honorables sont ceux qui vendent des patriotismes. Ce genre de « patriotes » se raviraient à m’entendre dire que « non seulement je suis Albanais, mais depuis que je suis allé en Grèce, je le suis devenu encore plus ! ». Car ce sont ces âneries-là que l’on enseigne à nos enfants dans les écoles. L’homme peut aller où il veut, jamais il ne changera.

C’est ainsi que l’on imagine, ici en Grèce, les émigrants grecs éparpillés dans le monde. C’est ainsi que cela se passe aussi pour les émigrants albanais. Mais n’y a-t-il pas pire échec que d’aller quelque part sans subir la moindre transformation ? Les gens émigrent depuis des millénaires. Ils s’adaptent à leur nouvel environnement, acquièrent une nouvelle identité, doublant, parfois triplant celle d’origine. D’autres, malheureusement, finissent dans des ghettos. Il n’y a que nous, gens des Balkans, à devoir être différents.

J’ai remarqué que ces « patriotes » qui « m’en veulent » de déclarer une double identité et m’accusent de trahir la « cause albanaise » ont changé leurs prénoms. Les Meti sont devenus Peti, les Qani Jani, les Bora Dhora... Si on leur en parle, ils sursautent : « ce sont les Grecs qui nous y ont contraints ». Pourquoi ne nous ont-ils pas contraint, nous autres ? Je ne leur en veux absolument pas, à ceux-là qui ont changé leur prénoms, c’est leur droit le plus strict. Mais c’est leur patriotisme qui me pose un problème, cela sent le Nouvel Homme, créature que la Mère Patrie s’est évertuée à élever pendant 50 années. Un homme doté de deux personnalités, l’envieux invétéré de tout individu qui désobéit aux règles de la « masse », et le vertueux qui se déclare individu indépendant. Il se méfie de tous ceux qui sont différents de lui, qui progressent dans leur vie. Qui n’est pas comme lui est louche. De tels individus, l’Albanie en déborde, il y en a partout à tout niveau de l’échelle sociale. Ces gens-là rêvaient autrefois de devenir membre du Bureau Politique, et aujourd’hui brandissent haut et fort le drapeau de l’anti-communisme. Autrefois ils dénonçaient leur voisin, aujourd’hui ils sont devenus des suppôts du capitalisme. L’hypocrisie, voilà notre sport national favori.

Mais revenons-en aux Balkans. Si j’avais écrit mon livre en anglais, en français, en italien ou en hollandais, pas de problème pour mes braves « patriotes ». Leur problème est justement qu’il ait été écrit en grec. Et c’est étrange, les « patriotes » grecs ont exactement le même souci. Ils trouvent cela suspect, « comment les gens osent-ils l’acheter ? Voilà qui est encore plus suspect, sûr qu’il ne l’a pas écrit tout seul ».

Pour reprendre le problème de l’identité. Les temps ont, certes, changé, mais certaines mentalités « patriotiques » sont encore prisonnières de 1945. Pour montrer ce que sont les Balkans, mon cher journal, je raconte toujours une anecdote sur mon nom de famille. Je me trouvais une fois dans une rencontre de journalistes des Balkans et quelqu’un me demande mon nom. Lorsque je réponds Kapllani, il a sursauté, « Mais c’est un nom turc ! ». « Mais non, dit un Grec, c’est grec ! ». « Mais non, dit une Bulgare, c’est bulgare ! ». Enfin, mon nom était tout sauf albanais. Sauf qu’il est tout cela à la fois. Kapllan en Albanie, Kapllanoglu en Turquie, Kaplanis en Grèce, Kaplanovic en Serbie, Kaplanofski en Bulgarie.

Les Balkans sont issus de la même matrice historique. C’est là la bénédiction et la malédiction des Balkans. Ils se ressemblent tous. Aujourd’hui encore nous revendiquons les mêmes héros, les mêmes saints, les mêmes démons. Au moment où il fallut former des Etats-nations, ils durent se convaincre de leur différence. Comment s’ils fussent descendu sur terre chacun de sa planète. Comment y parvenir autrement qu’en inventant des imbécillités et des mythologies sans fondements ? Jusqu’aux inepties. A Zagreb, j’ai demandé à quelques nationalistes croates si leur langue ressemblait à celle des Serbes. Ils m’ont sauté à la gorge presque, leur langue n’avait pas le moindre lien avec le serbe. Ils m’ont donné un exemple. Les Serbes disent vreme pour le temps, les Croates eux vrijeme. Et c’était le plus sérieux du monde !

C’est cela les Balkans. Il n’y a pas à s’étonner alors que l’on se débatte autant. Car les guerres fratricides sont les pires. En interviewant Ismaïl Kadaré pour le journal Ta Nea, je lui ai demandé son opinion sur les Balkans. « Les Albanais ont des problèmes quasiment avec tous leurs voisins, m’a-t-il répondu, lorsque je suis en Europe, j’ai la sensation que les peuples des Balkans sont mes cousins, alors je les défends si quelqu’un s’y attaque ». Car les Balkans ont une histoire tragique, ils ont besoin d’amour et de compassion. Mais surtout ils ont besoin de se libérer de la tutelle des « patriotes » et autres esprits obtus. Ils ont ce besoin de soigner leurs plaies, chacun dans son coin en cherchant le mal surtout chez le voisin. Pour la première fois dans son histoire, avec l’existence de l’Union européenne, de cette Union qui a l’air d’un enfant capricieux mais qui est une bénédiction pour les Balkaniques, nous pouvons dépasser nos frontières hermétiques, tragi-comiques, que avons mises entre nous jadis. Nous pouvons faire de notre histoire une vraie histoire et non une hystérie. Cela prendra du temps, il faudra plusieurs générations pour y arriver, mais il n’y a pas d’autre choix.

Ah, encore quelque chose, mon cher journal. À la question de savoir si je suis plus Albanais que Grec, je réponds en fonction de celui qui me la pose. Lorsque c’est un « patriote » albanais, je suis plus Grec. Lorsque c’est un « patriote » grec, je suis plus Albanais...
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