Bulgarie: crime organisé et crise gouvernementale
Par Khristo Dentchev (sources: Novinite, Sofia Weekly)
Alors qu'une douzaine de coups de feu ont retenti dans la capitale bulgare cette semaine, certains s'interrogent sur l'état de survie de l'Etat face à la toute puissance du crime organisé.
La coalition gouvernementale de trois partis au pouvoir est très ébranlée et il est peu probable que les deux nominations ministérielles décidées vendredi vont calmer les choses. L'opposition, les médias et sans doute une bonne part de l'opinion publique attendent plus et d'aucuns réclament le départ du ministre de l'Intérieur, Roumen Petkov.
Le Premier ministre, Sergueï Stanychev, qui semble totalement dépassé, a été sommé de s'expliquer devant le Parlement. Sa prestation a pour le moins déçu, apportant plus de questions que de réponses. Ses remontrances aux pouvoirs exécutif comme législatif n'ont fait entrevoir aucune solution.
S. Stanychev a certes reconnu que l'homme d'affaires Manol Velev, assassiné mercredi dans la banlieue de Sofia, a bien financé le Parti socialiste et la campagne présidentielle de Gueorgui Parvanov, ce dont, selon le Premier ministre, le PS bulgare n'a pas à se cacher ou avoir honte.
"Il n'y a pas de raison de se mentir et de prétendre qu'il n'y a pas de crime organisé en Bulgarie!", a-t-il déclaré, précisant que l'exécutif n'est pas seul responsable de cet état de fait. "Il y a des criminels qui sont en liberté alors qu'on a prouvé leur culpabilité!", a dénoncé S.Stanychev, citant pour exemple la décision prise mercredi par la Cour d'appel de Sofia qui a autorisé la mise en liberté de Evelin Banev, complice avéré du gang bien connu des frères Marguin: "J'étais étonné d'apprendre cette nouvelle. J'espère vraiment que les médias se trompent, mais j'en doute!", a-t-il conclu devant des députés médusés.
Les nominations de Petar Dimitrov et Meglena Tacheva ont été entérinées vendredi, aux postes de ministre de l'Economie et de ministre de la Justice. P.Dimitrov va remplacer Roumen Ovcharov, démissionné suite aux accusations portées contre lui concernant son intervention dans une grosse affaire de corruption. M.Tacheva remplacera Gueorgui Petkanov, qui a renoncé à ses fonctions, officiellement pour cause de "fatigue".
Les deux ministres ont démissionné quelques semaines à peine avant que la Commission européenne ne rende un rapport critique à l'encontre de la Bulgarie, dénonçant ses efforts insuffisants dans la lutte contre la corruption et le crime organisé, ainsi que les retards de la réforme du secteur judiciaire.
Contre toute attente, le maire de Sofia, Boïko Borisov, est venu au secours du gouvernement, jugeant que la démission du ministre de l'Intérieur ne ferait que renforcer l'assurance des mafias et des groupes criminels, leur prouvant qu'ils ont tout pouvoir.
Alors que certains jugent que le maintien inébranlable de Roumen Petkov prouve que l'Etat bulgare est moribond, les médias n'ont pas manqué de réagir avec ironie à cette remarque: si les groupes criminels contrôlent l'Etat, c'est que ce dernier n'est pas tout à fait mort!
Dépêche publiée le 14/07/2007