Réformer le système éducatif de la Bulgarie avant d’en faire un «pays de crétins»?
Par Céline Bayou (source : Novinite)
Depuis la mi-septembre, les enseignants bulgares demandent au gouvernement une augmentation de salaires de 100% et un engagement ferme à consacrer 5% du PIB à l’Education.
Les tensions sont montées d’un cran le 11 octobre, alors que près de 50.000 manifestants se sont rassemblés devant les bâtiments du gouvernement et du Parlement à Sofia. Ils ont appelé les autorités à cesser de traîner les pieds: il est urgent que le système éducatif bulgare se hisse au niveau des normes européennes.
Mais la rencontre entre les syndicats enseignants et les autorités s’est de nouveau soldée par un échec, les premiers ayant quitté la table des négociations furieux, dénonçant l’absence remarquée du ministre des Finances, Plamen Orecharski, et celle de propositions concrètes. «Nous devons trouver un accord d’ici dimanche et ramener dès lundi les professeurs et les étudiants dans les classes!», a commenté, laconique, le ministre de l’Education, Daniel Valchev.
Les deux ministres sont mis en cause depuis que, dimanche, la chaîne privée bTV a diffusé un enregistrement les montrant s’accordant sur les moyens de faire échouer les négociations. Depuis, les appels à la démission se multiplient et cet épisode a renforcé la rage et la détermination des grévistes.
Les enseignants demandent une augmentation immédiate de salaires de 25%, puis de nouveau en janvier et juillet 2008. Leur salaire mensuel moyen est actuellement de 440 levas, soit 226 euros. Ces exigences coûteraient 600 millions de levas aux autorités qui estiment ne pas pouvoir se permettre un tel écart alors que le déficit courant s’aggrave. Le gouvernement a donc proposé une hausse de 10% en janvier, puis une autre en juillet, majorées à chaque fois de 5% pour les enseignants «les plus qualifiés». Proposition rejetée par les syndicats.
Jeudi, le président de la Confédération des employeurs et industriels, Ivo Prokopiev, a remis au Premier ministre son Livre blanc sur l’économie et les affaires du pays; le texte préconise une réforme radicale du système éducatif bulgare afin que soient garantis son financement et sa qualité. L’absence de volonté politique du gouvernement en la matière y est directement dénoncée.
Le même jour, le recteur de l’Université de Sofia a menacé de fermer les portes de son institution si 50 millions de levas ne lui sont pas attribués immédiatement, afin de couvrir les besoins de base de l’établissement d’enseignement le plus prestigieux et le plus ancien du pays.
Le recteur n’a pas souhaité s’associer au mouvement de grève des enseignants, précisant: «Je me moque pas mal de la stabilité financière d’un pays de crétins! Je voudrais que la Bulgarie soit le pays de l’esprit et de la compétence, et que les jeunes soient heureux d’y vivre!» Et de qualifier de «mesquines» les discussions faisant un lien entre augmentations de salaires et accroissement de la qualité de l’enseignement.
Dépêche publiée le 12/10/2007 Regard sur l'est